En 2019, le montant total des aides directes de la PAC versées aux exploitations agricoles bretonnes s’élève à 472 millions d’euros, soit un peu moins de 6 % des aides versées dans l’Hexagone. Les aides surfaciques du second pilier représentent moins de 10 % de ce montant, une part deux fois moins importante qu’en France métropolitaine, en raison de la quasi absence de zones défavorisées en Bretagne. Seules une vingtaine d’exploitations touchent l’Indemnité compensatoire de handicaps naturels (ICHN), alors que dans les régions de montagne cette aide concerne un grand nombre d’exploitations et jusqu’à un quart des montants perçus. Néanmoins, les aides surfaciques du second pilier progressent, quand celles du premier pilier baissent (graphique 1 ). Le nombre de bénéficiaires s’accroît de 50 % entre 2015 et 2019, pour un montant global doublé.
Les élevages spécialisés laitiers, très présents en Bretagne, sont les premiers bénéficiaires, en nombre d’exploitations et en montant, des aides du second pilier, qui leur sont bien adaptées. Mais ces aides sont aussi très sollicitées par des éleveurs d’herbivores autres que bovins lait et par les exploitations en maraîchage, horticulture et cultures permanentes (graphique 2 ). La moitié des déclarants à la PAC dans ces spécialisations sont bénéficiaires d’aides du second pilier.
Les aides agroenvironnementales en nette progression
La forte progression des aides du second pilier s’opère sur les mesures agroenvironnementales (MAE) et sur les aides à l’agriculture biologique. Tant les montants globaux que les nombres de bénéficiaires sont en forte croissance (graphiques 3 et 4 ). En 2019, les aides agroenvironnementales représentent 29,6 millions d’euros et les aides bio 11,4 M€. Pour les 5 100 exploitations touchant une aide agroenvironnementale ou à l’agriculture biologique, les aides du second pilier représentent une part importante de leurs aides (cf. encadré Méthodologie, sources et définitions, aides retenues ), plus de quatre euros sur dix.
Les MAE sont des engagements à adopter ou à maintenir des pratiques favorables à l’environnement, pris volontairement par les agriculteurs. Généralement établies pour une durée de cinq ans, elles doivent comporter des exigences allant au-delà de la seule réglementation en vigueur. Les efforts entrepris par l’exploitant sont compensés par le versement d’une rémunération annuelle, calculée en fonction d’une estimation des coûts supplémentaires et des pertes de revenus dues aux engagements contractualisés. Apparues pour la première fois en 1985 dans les politiques agricoles, leurs définitions précises et modalités de gestion ont évolué au cours du temps, au gré des différentes périodes de programmation de la politique de développement rural (2000-2006, 2007-2013, 2015-2020, 2014 étant une année de transition).
Les MAE intègrent les enjeux climatiques et deviennent MAEC
Pour la programmation 2015-2020, le champ des enjeux environnementaux retenus s’élargit aux enjeux climatiques, d’où le nom de Mesures agroenvironnementales et climatiques (MAEC). Elles sont de trois types. Les mesures systèmes concernent l’exploitation agricole dans son ensemble et peuvent répondre à plusieurs enjeux environnementaux. Les mesures dites localisées, à la parcelle, au linéaire (par exemple haie) ou au point (par exemple arbre isolé), sont conçues pour concentrer les efforts sur un problème environnemental spécifique et localisé. Enfin, un troisième type de mesures répondent à un objectif de préservation des ressources génétiques : protection des races animales et végétales menacées de disparition, amélioration du potentiel pollinisateur des abeilles.
Les deux premiers types de MAEC sont désormais territorialisées. En effet, si l’essentiel de leur cahier des charges et la liste des actions mobilisables sont définis dans un cadre national, elles sont mises en œuvre dans le cadre de Projets agro-environnementaux et climatiques (PAEC), portés par les acteurs des territoires et sélectionnés par les Régions, autorités de gestion sur cette programmation. Un PAEC est piloté par un opérateur qui définit un périmètre et propose aux agriculteurs de la zone un ensemble d’actions. Deux grands enjeux environnementaux ont été retenus en Bretagne : la reconquête de la qualité des sols et des eaux, la préservation et la restauration de la biodiversité (encadré 1 ).
Comme les MAEC, les aides à la Conversion à l’agriculture biologique (CAB) et au Maintien de l’agriculture biologique (MAB) encouragent l’adoption ou le maintien de pratiques favorables à l’environnement, celles induites par le respect du cahier des charges de l’agriculture biologique. L’engagement, volontaire, des agriculteurs, est également de cinq ans, y compris pour la CAB, alors que la période de conversion des animaux ou des surfaces est inférieure à trois ans. Contrairement aux MAEC, la CAB et la MAB sont des mesures ouvertes sur l’ensemble du territoire national. Les montants d’aide à l’hectare (tableau 1 ) s’appliquent aux surfaces engagées. Toutes les surfaces conduites en bio d’une exploitation ne sont pas forcément engagées, en raison d’un plafonnement.
À de rares exceptions près, qui concernent des cultures pérennes, une même exploitation ne peut pas souscrire à la fois une CAB ou une MAB et une MAEC système. En revanche, une parcelle peut être engagée à la fois en MAEC localisée et en CAB ou MAB, ou à la fois en MAEC localisée et en MAEC système.
Encadré 1 - Les MAEC en Bretagne
En Bretagne, les mesures systèmes retenues concernent les exploitations de polyculture-élevage herbivore (
MAEC SPE ), les systèmes d’exploitation herbagers et pastoraux (
MAEC SHP ) et les systèmes de polyculture-élevage monogastrique (
MAEC SPE9 ). Les MAEC SHP et SPE9, souscrites par très peu d’exploitations, ne sont pas détaillées ici.
La MAEC SPE est un engagement sur cinq ans qui vise une meilleure autonomie alimentaire de l’élevage, grâce à un recouplage entre ateliers végétal et animal, en favorisant l’herbe dans l’assolement et en limitant le maïs fourrage. Les conditions à remplir sont le maintien d’une activité d’élevage (au moins 10 Unités gros bétail (UGB) herbivores), le respect d’une part minimale d’herbe dans la Surface agricole utilisée (SAU) et d’une part maximale de maïs fourrage dans la Superficie fourragère principale (SFP), la diminution des traitements phytosanitaires et le suivi d’un conseil sur la gestion de l’azote. Les achats de concentrés sont plafonnés en fonction des types d’animaux. Les prairies permanentes n’entrant pas dans une rotation ne peuvent pas être retournées.
Trois niveaux d’exigence décroissante existent :
niveau 1, au plus 12 % de maïs et au moins 70 % d’herbe, en abrégé SPE1 12-70 ; niveau 2, 18 % de maïs et 65 % d’herbe, SPE2 18-65 ; niveau 3, 28 % de maïs et 55 % d’herbe, SPE3 28-55 .
Les MAEC SPE peuvent être souscrites en maintien, pour les exploitations respectant les critères de part d’herbe, de part de maïs et de niveau d’achats de concentrés dès la première année d’engagement. Sinon, les exploitations peuvent souscrire une MAEC SPE évolution. Les trois critères sont alors à atteindre en troisième année d’engagement. Le cahier des charges s’applique à l’ensemble de l’exploitation, même si toutes les surfaces ne sont pas forcément rémunérées, pour cause de plafonnement (tableau 2). Les MAEC SPE ont été ouvertes sur tout le territoire breton, y compris hors PAEC. D’une zone à l’autre, les conditions à remplir étaient les mêmes, à l’exception de l’Indice de fréquence de traitement (IFT) par des produits phytosanitaires, dont la référence était fixée par territoire.
Les 47 MAEC localisées existant en Bretagne – mais pas forcément dans chaque PAEC - sont construites à partir des engagements unitaires définis dans le cadre national et répondent à des enjeux environnementaux liés à l’eau ou à la biodiversité : mise en herbe et gestion de l’herbe, réduction des produits phytosanitaires, absence de fertilisation, ouverture des milieux, gestion des milieux humides, entretien des haies, des arbres isolés, des fossés et canaux, des mares et plans d’eau, des vergers, etc. Ces engagements concernent des surfaces (MAEC LOC S ) ou des "linéaires" ou des "ponctuels" (MAEC LOC LP ).
La Bretagne a ouvert deux mesures pour la préservation des ressources génétiques : Amélioration du potentiel pollinisateur des abeilles (API ) et Protection des races (animales) menacées (PRM ).
Une large couverture du territoire par les PAEC à enjeu eau et biodiversité
En Bretagne, 47 PAEC ont été validés par la commission agroenvironnementale régionale. Leur surface couvre 90 % du territoire breton. Ils ont été ouverts progressivement de 2015 à 2017. Dès 2015, 25 territoires, couvrant plus de la moitié du territoire régional, étaient validés (carte 1 ).
L’enjeu eau est le plus répandu, dans 45 PAEC. Marais de Vilaine et Marais Salé du Mont Saint-Michel sont les deux territoires où des mesures localisées rattachées à l’enjeu eau n’ont pas été proposées. L’enjeu phytosanitaire, sous-enjeu de l’enjeu eau, est ouvert dans 28 PAEC, avec des périmètres plus restreints que les périmètres eau, couvrant un petit tiers du territoire régional. L’enjeu captage prioritaire, également un sous-enjeu eau, est par nature très circonscrit. Il ne concerne que cinq territoires, pour 5 % de la surface régionale. L’enjeu biodiversité a été retenu dans quarante PAEC, dans des périmètres couvrant près des deux tiers de la Bretagne.
La majorité des opérateurs porteurs de PAEC sont des collectivités territoriales animatrices de bassins versants ; cette spécificité bretonne marque l’importance de l’enjeu eau dans la région. Au-delà des porteurs de PAEC, une grande diversité d’acteurs se sont mobilisés pour informer les agriculteurs sur les MAEC et les accompagner : réseaux des chambres d’agriculture, Centres d’initiative pour valoriser l’agriculture et le milieu rural (Civam), Groupements d’agriculteurs biologiques (GAB), centres comptables, animateurs Natura 2000, contrôle laitier… Ils ont en particulier fait la promotion des MAEC SPE herbivores. En matière d’accompagnement au changement des pratiques de fertilisation et de protection des cultures, le rôle des chambres d’agriculture est notable (encadré 2 sur les résultats de l’enquête BV 2018 ).
Les MAEC SPE herbivores ouvertes au plus grand nombre
Dans un souci de simplicité et de lisibilité, et répondant à une volonté politique de favoriser les systèmes herbagers, la Bretagne a choisi dès 2015 d’ouvrir l’accès aux MAEC SPE herbivores de niveaux 1 et 2 à tous les agriculteurs bretons, qu’ils soient ou non situés dans un PAEC. Les MAEC SPE de niveau 3, ouvertes dès 2015 pour les agriculteurs situés dans un PAEC, sont devenues accessibles aux agriculteurs hors PAEC en 2016, dans le cadre du plan lait.
La souscription aux différentes mesures et notamment aux MAEC système a été forte dès le début de la programmation 2015-2020 (graphiques 5, 6 et 7 ). La clause de révision incluse dans les contrats souscrits à partir de 2011 a mécaniquement entraîné beaucoup de nouveaux contrats en 2015. Elle obligeait les agriculteurs engagés dans la précédente programmation (2007-2013) à interrompre leur engagement fin 2014 avant l’échéance des cinq ans, sans pénalité, et leur permettait de souscrire, s’ils le souhaitaient, un nouvel engagement dans une mesure équivalente. La Prime herbagère agro environnementale (PHAE) et la Mesure agroenvironnementale Système fourrager économe en intrants (SFEI) disparaissant en fin de programmation 2007-2013, les exploitations concernées se sont engagées dans les mesures s’inscrivant dans leur continuité. Par ailleurs, le contexte de crise laitière, avec un prix du lait bas, a sans doute incité les exploitations laitières à réduire leurs charges. Le choix d’un système davantage herbager représente un moyen d’y parvenir. La souscription massive aux MAEC Système polyculture élevage, dont l’objectif est de soutenir des systèmes herbagers (SPE maintien) ou d’accompagner la transition vers des systèmes herbagers (SPE évolution), n’est donc pas surprenante. D’autant que ces mesures ont été ouvertes d’emblée sur l’ensemble du territoire régional. Sur la seule année 2015, plus de 1 500 contrats de MAEC système ont ainsi été souscrits, correspondant à un engagement de 71 M€, soit près de la moitié des sommes engagées sur la période 2015-2020 pour ces mesures. Plus des trois quarts étaient des mesures MAEC SPE maintien. Elles correspondaient en effet à une attente des agriculteurs, notamment de ceux en système herbager de longue date. Par la suite, les engagements en mesures évolution ont pris le pas sur ceux en mesures maintien (tableau 3 ).
Un démarrage pied au plancher pour les MAEC système, plus progressif pour les MAEC localisées
Les exploitations cœur de cible des MAEC système se sont probablement engagées dès les premières années. La dynamique de contractualisation s’est ensuite ralentie en 2017, 2018 et 2019, le "vivier" des exploitations susceptibles de souscrire ces mesures s’étant réduit et les freins à la contractualisation sur ces exploitations étant probablement plus nombreux. Les retards de paiements conséquents sur les premières campagnes ont pu refroidir certains agriculteurs.
Au final, sur la population des exploitations déclarantes à la PAC en 2015 et encore présentes en 2019, 55 % de celles détenant au moins 10 UGB herbivores et dont l’assolement 2015 était compatible avec la MAEC SPE maintien de niveau 3 se sont effectivement engagées en MAEC SPE entre 2015 et 2019. Cette proportion est considérable, sachant que les critères ne sont pas seulement limités à ceux d’assolement et d’activité d’élevage herbivore (encadré 1 ). En 2019, les bénéficiaires des MAEC SPE herbivores représentent 12 % des déclarants bretons et leurs surfaces engagées 12 % des surfaces déclarées à la PAC. La Bretagne se place d’ailleurs en deuxième position des régions de l’Hexagone pour la part de SAU engagée en MAEC systèmes et localisées. Elle est devancée par Provence-Alpes-Côte d’Azur, où plus du quart de la SAU est sous contrat. Comparée à la SFEI, qui chaque année concernait un millier de bénéficiaires, la MAEC SPE herbivore touche un plus large public, le nombre de bénéficiaires oscillant entre 1 500 (en 2015) et 2 800 (en 2019).
Pour les MAEC localisées, la souscription des contrats a été plus étalée dans le temps. En 2015, les cahiers des charges n’étaient pas finalisés au démarrage de la campagne. En particulier, les mesures linéaires et ponctuelles ont connu un démarrage plus lent, et la moitié des contrats ont été souscrits en 2017. En effet, la mesure phare HA03 (entretien des haies arborescentes) n’a été ouverte qu’à partir de 2016 sur quelques territoires puis plus largement en 2017.
En 2020, surtout des prolongations des premiers contrats arrivant à échéance
En 2020, les contrats souscrits en BIO CAB, MAEC API et PRM restent des contrats de cinq ans. Mais, à l’approche de la fin de programmation et de la transition avec la prochaine programmation, pour les MAEC système et la MAB, les nouveaux contrats souscrits sont très majoritairement à durée réduite afin de faciliter la gestion financière. Neuf euros sur dix engagés pour ces mesures en 2020 le sont dans le cadre de contrats d’un an. C’est pourquoi les montants engagés en 2020 sont faibles au regard du nombre de contrats souscrits et des surfaces concernées. La possibilité de souscrire des contrats de cinq ans est néanmoins restée ouverte pour les jeunes agriculteurs et les exploitations situées en baies algues vertes. En 2020, les trois quarts des contrats souscrits, toutes mesures confondues, sont des reconductions de contrats souscrits les années précédentes.
Sur les campagnes 2015 à 2020, hors CAB et MAB, les montants engagés s’élèvent à 172 M€, soit 29 M€ par an, un budget moyen annuel deux fois supérieur à celui de la précédente programmation. Avec la CAB et la MAB, les montants engagés s’élèvent à près de 250 M€, dont 60 % consacrés à la MAEC SPE. Pour répondre aux besoins exprimés par les exploitants, le conseil régional de Bretagne, autorité de gestion sur cette période, a décidé au fil de la programmation d’augmenter l’enveloppe du Fonds européen agricole pour le développement rural (Feader) dédiée aux engagements MAEC et bio. En principe, le Feader intervient à hauteur de 75 % des aides versées, en contrepartie des cofinanceurs nationaux. Ces derniers peuvent cependant ajouter des financements supplémentaires dits top-up. En Bretagne, un tiers des financements sont des financements top-up. C’est pourquoi le Feader ne finance que la moitié des montants. Néanmoins, il reste de loin le principal financeur (graphique 8 ).
L’Europe, premier financeur des MAEC, CAB et MAB
Plus d’un quart du financement est apporté par l’État. 15 M€ proviennent du Programme des interventions territoriales de l’État (PITE). Cet outil budgétaire facilitant la conduite de politiques territoriales interministérielles, porté par le ministère de l’Intérieur, est mobilisé au titre de l’action "Eau, agriculture en Bretagne". L’objectif de cette action, pilotée par le préfet de région Bretagne, est l’amélioration de la qualité de l’eau bretonne, en particulier pour lutter contre la prolifération des algues vertes. Il s’agit d’inciter les agriculteurs et les autres acteurs économiques à supprimer les atteintes à l’environnement et notamment à réduire les risques de pollution par les nitrates. Avec 33 M€ dont 1,9 M€ au titre du programme Écophyto, l’Agence de l’eau Loire-Bretagne est le troisième financeur des MAEC et CAB, MAB, suivi par le conseil régional, à hauteur de 23 M€. Le conseil régional de Bretagne est de loin la région la plus impliquée dans le financement des MAEC et des aides CAB et MAB. En effet, les fonds mobilisés par la région pour le paiement des aides de 2015 à 2020 représentent un tiers des fonds mobilisés par l’ensemble des régions françaises. Les contributions des départements des Côtes-d’Armor et du Finistère représentent quant à elles moins de 1 % des montants engagés.
Les MAEC SPE herbivores
Les MAEC système s’adressent, par nature, sauf la SPE9, aux exploitations où l’élevage herbivore est majoritaire. Les exploitations relevant des Orientations technico économiques (Otex) herbivores (bovins lait, bovins viande, bovins mixtes, ovins caprins et autres herbivores) représentent ainsi 80 % des exploitations engagées en 2019, contre 43 % dans l’ensemble des déclarants bretons (graphique 9 ). En particulier, les Otex bovins viande et ovins caprins et autres herbivores y sont surreprésentées. Que ce soit dans les mesures évolution (SPE) ou maintien (SPM), ces types d’exploitations, dont le fonctionnement repose traditionnellement sur l’herbe, sont surtout engagés dans les niveaux les plus exigeants. Elles représentent ainsi la moitié des exploitations engagées en SPE1 et SPM1 (encadré 1 ), mais moins de 10 % des exploitations engagées en SPE3 et SPM3. À l’inverse, les exploitations laitières représentent deux tiers des exploitations engagées en SPE3 et SPM3, mais seulement un quart des exploitations engagées en SPE1 et SPM1. La transition des exploitations spécialisées laitières vers des systèmes plus herbagers est en effet délicate. Elle oblige à repenser le fonctionnement global de l’exploitation et remet parfois en question de manière importante les pratiques historiques et les indicateurs économiques. La réduction du maïs, le plafonnement des achats de concentrés et l’augmentation de l’herbe ont des impacts potentiels sur le niveau de production laitière, sur la gestion de l’herbe (pâturage ou fauche, avec un risque de mécanisation accrue), sur les charges de structure, etc. Une bonne maîtrise technique est donc nécessaire, afin notamment de trouver l’équilibre du système fourrager adapté au contexte de l’exploitation.
Le montant annuel moyen reste stable sur toute la période 2015-2020, autour de 9 000 € par exploitation, montant proche des plafonds par exploitation (tableau 2 ). 15 % des surfaces engagées en 2019 ne sont dans les faits pas rémunérées, en raison des modalités de plafonnement de l’aide.
Les MAEC SPE contribuent au maintien régional des surfaces en herbe
Les surfaces en herbe déclarées par les exploitations bretonnes représentent un bon tiers des surfaces déclarées à la PAC. Sur la période 2015-2019, elles évoluent peu, progressant d’environ 3 000 ha (moins de 1 % d’évolution). Cette faible évolution s’inscrit dans le cadre d’une PAC vigilante, avec une surveillance des surfaces en prairies et un encadrement de leur retournement. Les MAEC SPE y jouent un rôle incitatif. Ainsi, les exploitations engagées en MAEC, y compris celles en mesure maintien, augmentent notablement leur part de SAU en herbe, quand cette proportion est plutôt en léger repli sur les exploitations non engagées (tableau 4 ).
Les exploitations en MAEC SPE contribuent ainsi au maintien des surfaces en herbe au niveau régional (cartes 2 et 3 ). Elles remplissent également leur objectif de réduction du maïs fourrage 1
Dans deux PAEC, Flume et Ria d’Etel, la part de l’herbe des exploitations en MAEC SPE est en léger repli. Toutefois, en 2019 elle y dépasse 88 % de la SAU et les exploitations de ces territoires, quasiment toutes engagées en mesure maintien de niveau 1, respectent bien leur engagement.
Les exploitations engagées en MAEC font également plus appel aux légumineuses. Même si la part des surfaces en légumineuses est limitée (6 % en 2019), elle est plus élevée que dans les exploitations non engagées (3 %) et progresse un peu plus entre 2015 et 2019.
Contrairement à la mesure Système fourrager économe en intrants (SFEI) de la précédente programmation, le cahier des charges des MAEC ne limite pas la fertilisation azotée. Les agriculteurs souscrivant une MAEC SPE herbivore s’engagent néanmoins à bénéficier d’un appui technique de deux demi-journées minimum sur le thème de la gestion de l’azote. En Bretagne, les exploitants ont pu remplir cette condition en suivant la formation Pass’MAEC cofinancée par la région Bretagne. Cette formation, en deux parties d’une journée chacune, vise dans un premier temps une meilleure compréhension du cahier des charges, pour faciliter son respect (journée "sécurisation"). Dans un second temps, elle aborde des aspects techniques (gestion de l’herbe, alternatives aux traitements phytosanitaires…) et économiques permettant d’inscrire dans la durée la transition vers le système herbager (journée "pérennisation").
Une moindre pression d’azote sur les exploitations engagées
Malgré l’absence de contrainte quantitative sur la fertilisation azotée, à spécialisation des exploitations identique, la pression d’azote, mesurée par la quantité d’azote total (minéral et organique) épandue par hectare de SAU, est moindre sur les exploitations engagées en MAEC SPE, par rapport aux exploitations sans engagement. La spécialisation ovins, caprins et autres herbivores fait cependant exception, aucune différence flagrante n’étant constatée.
Les exploitations engagées en CAB ou MAB semblent encore plus vertueuses que celles en MAEC SPE. Par ailleurs, les exploitations qui s’inscrivent dans une dynamique d’évolution, en CAB pour celles en mesures bio ou en mesures évolution pour celles en MAEC SPE, ont des pressions d’azote supérieures à celles des exploitations stabilisées, en MAB ou mesures maintien. Enfin, au sein des exploitations en MAEC SPE, la pression d’azote est d’autant plus faible que la mesure est exigeante (graphique 10 ).
Les MAEC localisées
Par définition, les MAEC localisées surfaciques concernent des surfaces bien plus restreintes que les mesures système. Le bénéfice des MAEC localisées n’était ouvert qu’aux parcelles incluses dans les périmètres concernés des PAEC et, sauf pour les mesures de réduction des produits phytosanitaires, pour lesquelles le porteur de PAEC établissait une attestation certifiant l’éligibilité de la parcelle au regard des enjeux eau ou biodiversité. De ce fait, moins de 14 000 hectares ont fait l’objet d’engagements sur la période 2015 à 2019, contre près de 170 000 pour les MAEC système (graphique 6 ). La moitié du petit millier d’exploitations en MAEC localisées surfaciques y ont engagé moins de sept hectares. Les surfaces engagées représentent moins de 0,5 % des surfaces déclarées à la PAC, que ce soit pour l’enjeu eau ou pour l’enjeu biodiversité. Quelques PAEC font exception, avec une part des surfaces déclarées à la PAC engagées en MAEC localisées surfaciques entre 12 % et 40 % : Groix, Belle-Île et les Marais de Vilaine. Les exploitations de Groix, ne détenant pas d’herbivores, ne pouvaient s’engager en MAEC système et ont donc opté pour des MAEC localisées. À Belle-Île-en-Mer, un gros travail de naturaliste sur les prairies a favorisé la contractualisation des MAEC localisées. Dans les Marais de Vilaine, correspondant à une zone Natura 2000 à cheval sur la Bretagne et les Pays de la Loire, une animation soutenue autour des MAEC localisées a démarré très tôt.
Les MAEC localisées, du sur mesure
Le nombre de mesures proposées aux agriculteurs dans les PAEC a été très variable, allant d’une seule mesure à une douzaine, en fonction de l’étendue du territoire et de la nature des enjeux présents. Dans 42 PAEC, plus des trois quarts des mesures proposées ont fait l’objet d’au moins une souscription.
Certaines mesures ont été proposées dans plus de trente territoires et ont été largement souscrites. Il s’agit de mesures de gestion des prairies par la fauche ou le pâturage, essentiellement en zone humide. Ainsi, les mesures HE05 (absence de fertilisation et gestion de l’herbe par la fauche), HE04 (absence de fertilisation et réduction de la pression au pâturage) et HE02 (gestion de l’herbe par retard de fauche) comptaient plus de 700 bénéficiaires en 2019, pour une surface engagée de 5 100 hectares. À l’opposé, les MAEC localisées permettant de faire du cousu main, certaines mesures très adaptées à des enjeux de territoires spécifiques, notamment les Marais de Vilaine, les Marais salés du Mont-Saint-Michel et les Monts d’Arrée, n’ont été ouvertes que sur quelques PAEC, voire un seul PAEC. Par exemple, la mesure HE22 (entretien des landes atlantiques par la réduction de la fréquence de fauche) n’a été souscrite que dans le Parc naturel régional d’Armorique, mais par 35 exploitations pour une surface engagée totale de 721 ha.
Par rapport aux MAE territorialisées (MAET) de la précédente programmation, le nombre de bénéficiaires des MAEC localisées surfaciques, dont le pic atteint le millier en 2019, est inférieur (jusqu’à 1 700 bénéficiaires de MAET en 2012). Notamment, une part non négligeable des bénéficiaires de MAET se sont réorientés vers des MAEC SPE.
Les spécialisations des exploitations engagées en MAEC localisées surfaciques sont peu différentes de celles observées sur l’ensemble des déclarants (graphique 9 ).
Les MAEC localisées linéaires et ponctuelles
Une seule mesure localisée ponctuelle a été ouverte, AR01 (entretien des arbres isolés et/ou en alignement). Ouverte sur deux PAEC en 2015, elle concerne 13 PAEC depuis 2017. Une trentaine d’exploitations l’ont souscrite pour près de 3 300 arbres engagés.
La longueur totale des linéaires engagés en 2019 est inférieure de 15 % au pic de 1 090 km atteint en 2012 lors de la précédente programmation. Les MAEC linéaires les plus souscrites sont celles en faveur du bocage. En 2019, plus de 900 km sont engagés dans des mesures d’entretien des haies, dont près de 760 km dans la seule mesure HA03 (entretien des haies arborescentes). Cette mesure, très adaptée au bocage breton, a été mise en place en 2016 sur 11 territoires et a véritablement décollé en 2017. Elle est désormais ouverte dans 35 PAEC et concerne plus de 300 exploitations.
Avec des quantités engagées limitées et des plafonds annuels d’aide plus bas (5 000 € ou 9 000 € selon les mesures et les campagnes), les montants moyens d’aide en MAEC LOC LP et S sont inférieurs à ceux des MAEC systèmes et des aides CAB et MAB (graphique 11 ). Le budget consacré aux MAEC localisées atteint néanmoins 16 M€ sur la période 2015 à 2020, dont la moitié pour des mesures participant à la gestion des prairies en zones humides et un cinquième pour des mesures contribuant au maintien et à l’entretien du bocage (graphique 12 ).
Les CAB et MAB De nombreux agriculteurs bio privilégient la MAEC SPE
Les mesures d’aides à l’agriculture biologique, CAB (conversion) et MAB (maintien), ont aussi connu un franc succès. Le nombre de bénéficiaires est ainsi passé de 900 en 2015 à 1 500 en 2019 (graphique 3 ). La souscription de contrats CAB était régulière, oscillant entre 250 et 330 contrats selon les années (graphique 5). La contractualisation des MAB a été plus irrégulière, avec un pic de 740 engagements en 2015. En 2019, 7 % des déclarants bretons sont engagés en CAB ou MAB, soit six exploitations sur dix ayant des surfaces en bio (cf. encadré Méthodologie, sources et définitions ). Un tiers des exploitations bretonnes déclarant des surfaces bio ont préféré souscrire une MAEC SPE. En effet, selon le type d’exploitation, l’aide MAEC SPE peut s’avérer plus avantageuse que les aides bio, notamment que la MAB (graphique 11 ). Pour les surfaces en herbe en particulier, les montants à l’hectare sont supérieurs en MAEC SPE par rapport à la MAB (tableaux 1 et 2 ). Par ailleurs, l’ensemble des surfaces en herbe des exploitations bio ne sont pas forcément rémunérées en CAB ou MAB, en raison de la contrainte de taux de chargement de 0,2 UGB/ha. Tandis que les cahiers des charges des MAEC SPE imposent un effectif minimal d’herbivores mais aucun taux de chargement minimal. Enfin, si les MAEC SPE ne grèvent pas le crédit d’impôt en faveur de l’agriculture biologique, en revanche le crédit d’impôt ne peut être cumulé avec la CAB ou la MAB que si la somme des deux ne dépasse pas 4 000 €. Ainsi, 37 % des surfaces déclarées conduites en bio à la PAC sont rémunérées par des MAEC SPE et non par des CAB ou MAB (graphique 13 ). Comme pour les agriculteurs conventionnels, la MAEC SPE la plus souscrite par les agriculteurs bio (cf. encadré Méthodologie, sources et définitions) est la SPM1 (12-70). Mais les mesures souscrites par les bios sont plus exigeantes ; il y a davantage, en proportion, de SPM1 et SPE1 chez les bios que chez les conventionnels. Il y a également davantage d’élevages avec un troupeau laitier chez les exploitants bio ayant souscrit une MAEC SPE que chez les conventionnels, où les troupeaux allaitants sont plus fréquents.
La conversion à la bio entraîne une évolution du système d’exploitation vers plus d’herbe et moins de maïs. C’est ce que l’on observe chez les "nouveaux" bio, c’est-à-dire les agriculteurs déclarant des parcelles bio en 2019 mais pas en 2015. Les "anciens" bios (ceux déclarant déjà des parcelles bio en 2015) engagés en MAEC SPE continuent de faire progresser la part d’herbe dans la SAU, qu’ils aient souscrit une mesure évolution ou une mesure maintien. Pour ces exploitations, les MAEC permettent donc d’accompagner les évolutions de système déclenchées par la conversion à la bio.
Les engagements propres à l’agriculture biologique, CAB et MAB, sont, relativement à la population globale, plus souscrits par des exploitations horticoles (dont maraîchage) et spécialisées en cultures permanentes (dont cultures fruitières) et, dans une moindre mesure, par des exploitations en polyculture polyélevage (graphique 9 ). Néanmoins, les exploitations laitières, peu engagées dans la mesure maintien, représentent une exploitation ayant souscrit une CAB sur cinq.
Les enjeux et défis de la prochaine programmation
À l’issue de la programmation 2007-2013, il est apparu que le dispositif des MAE jouait davantage un rôle d’amortisseur qu’un rôle moteur dans la décision de changer de pratiques, les deux leviers principaux restant la réglementation et l’économie. Le rôle des MAE est important pour accompagner des transitions susceptibles de déstabiliser le fonctionnement de l’exploitation et de fragiliser temporairement son équilibre économique. À l’approche de la fin de la programmation actuelle, alors que les efforts des agriculteurs, des structures d’accompagnement et des financeurs ont été conséquents, la question de la pérennité des pratiques initiées par les MAEC se pose à nouveau. C’est le défi de la préparation de la prochaine programmation. Elle doit à la fois continuer à faire progresser les exploitations, et faire en sorte que celles ayant déjà adopté des pratiques vertueuses les maintiennent.
Encadré 2 - Les pratiques agricoles d’après l’enquête régionale 2018 dans les bassins versants en Bretagne
L’enquête régionale, portant sur la campagne 2018, avait comme objectif de caractériser les pratiques des agriculteurs, essentiellement dans les domaines de la fertilisation et de l’utilisation des produits phytosanitaires. 3 745 exploitations, représentatives des exploitations bretonnes dans les différents bassins versants de la région, ont été interrogées. En fin de questionnaire, elles déclaraient leurs engagements actuels et futurs (MAEC, certification bio, Breizh bocage, fermes DEPHY, etc.). En 2018, 545 étaient engagées en MAEC (tous types de MAEC confondus et quelle que soit l’année de souscription) et 264 certifiées en agriculture biologique pour au moins une production (indépendamment d’un engagement éventuel en CAB ou MAB). Cela permet de mettre en évidence quelques différences structurelles et de pratiques en 2018 et des différences d’évolution des pratiques sur les cinq années précédentes.
Une bonne connaissance des acteurs et enjeux du territoire
Les structures animatrices des bassins versants et les enjeux environnementaux rattachés à ces territoires sont largement connus, des trois quarts des agriculteurs bretons. Mais les exploitations engagées en MAEC ou conduites en bio y sont encore plus sensibilisées. Ainsi, plus de huit exploitations sur dix déclarent les connaître.
La conduite plus extensive des ateliers animaux sur les exploitations en bio ou MAEC se traduit par une pression d’azote organique brut (avant d’éventuels traitement, import ou export) inférieure à celle de la population globale. La pression d’azote minéral est beaucoup plus faible sur les exploitations bio (8,5 kg N/ha) que sur les exploitations conventionnelles (66,1 kg N/ha). Dans une moindre mesure, les exploitations en MAEC ont aussi moins recours à l’azote minéral. L’azote total épandu (organique net + minéral) est nettement inférieur sur les exploitations bio (102 kg N/ha) par rapport aux exploitations en MAEC (150 kg /ha), qui sont elles-mêmes en dessous de la population globale (169 kg / ha).
Interrogées sur les pratiques de fertilisation qu’elles ont fait évoluer sur les cinq dernières années, seules 17 % des exploitations bio disent avoir diminué leurs achats d’engrais, contre 41 % des exploitations conventionnelles. Cette faible proportion s’explique sans doute par leur niveau déjà bas d’apport d’azote minéral.
Par ailleurs, les exploitations bio ou en MAEC ne se distinguent pas des autres exploitations quant à l’augmentation ces cinq dernières années de la Surface amendée en matière organique (Samo) dans la SAU ni à l’augmentation de la fertilisation organique sur le blé et les prairies. Ces pratiques sont préconisées car, pour des raisons matérielles et techniques, les éleveurs ont plutôt tendance à épandre leurs effluents sur le maïs. En augmentant les surfaces amendées, notamment sur les parcelles en blé et en prairies, la concentration des effluents sur certaines parcelles est évitée. L’azote est ainsi mieux réparti et son lessivage limité. Néanmoins, si les bio ont une Samo sur SAU équivalente à celle des conventionnels (50 %), la part des surfaces en maïs amendées avec des matières organiques y est inférieure (78 % contre 90 %) et la part des prairies supérieure (49 % contre 40 %). Les pratiques des exploitations en MAEC sont quant à elles comparables à celles de la population globale.
Enfin, environ une exploitation bio ou MAEC sur six déclare avoir retardé leur période de fauche, contre seulement 8 % dans la population globale. Un tiers des exploitations en MAEC évoquent comme première motivation à cette évolution les aides agro-environnementales. Il existe en effet des mesures localisées surfaciques spécifiques à la gestion de l’herbe avec retard de fauche.
L’importance de l’accompagnement au changement
En matière d’accompagnement au changement, les échanges avec des connaissances privées sont très moteurs. Plus d’un agriculteur sur deux ayant modifié ses pratiques de fertilisation mentionne cette voie d’accompagnement, sans toutefois qu’il y ait de différence entre les agriculteurs bio, conventionnels ou engagés en MAEC. Le rôle des chambres d’agriculture est également pleinement reconnu. Quatre exploitants sur dix mentionnent cette structure comme ayant mené une action d’aide au changement, et la proportion grimpe même à plus de cinq sur dix pour les exploitants engagés en MAEC. Les coopératives sont moins citées. 36 % des agriculteurs y font référence, mais seulement 12 % des exploitations bio. Les structures animatrices des bassins versants sont relativement peu mentionnées, par 15 % des agriculteurs. Néanmoins, leur rôle est plus déterminant pour les exploitations en MAEC (un cinquième les mentionnent) et surtout les exploitations bio (un quart).
Pour le pilotage de la fertilisation, les plans prévisionnels de fumure sont souvent réalisés par des organismes de conseil, en particulier les coopératives, les centres de gestion et le contrôle laitier. Cependant, les exploitants bio et en MAEC réalisent plus souvent leur plan prévisionnel de fumure par eux-mêmes que les autres exploitations. Pour les bio, c’est d’ailleurs la principale modalité, avec 28 % des exploitations. Les outils d’aide à la décision, qui permettent aux agriculteurs de dépasser la dose d’azote programmée en début de campagne afin de répondre aux besoins des plantes, sont moins souvent utilisés par les exploitations bio et engagées en MAEC que par les autres.
Les exploitations en MAEC sont moins nombreuses à utiliser des produits phytosanitaires que les exploitations non engagées : 73 % contre 87 %. Cette proportion chute à 21 % pour les exploitations bio. De même, exploitations bio et en MAEC utilisent moins souvent des semences traitées.
La culture sans labour est plus compliquée si elle doit se faire sans herbicides. C’est pourquoi seulement 12 % des cultures sont implantées sans labour sur les exploitations bio, contre un quart sur les exploitations conventionnelles. Le désherbage alternatif (aux herbicides) est plus fréquent sur les exploitations bio. 60 % y ont recours. Les exploitations en MAEC, soumises à une contrainte de réduction de leur Indice de fréquence de traitement (IFT) pour celles en MAEC système, le pratiquent également plus souvent (28 % contre 18 % dans la population globale). Ainsi, sur la campagne 2017-2018, plus des trois quarts des surfaces en maïs des exploitations bio ont été désherbées sans herbicides, et un cinquième des surfaces des exploitations en MAEC, contre seulement un hectare de maïs sur dix dans la population globale. Le désherbage alternatif s’est développé ces cinq dernières années. Un cinquième des agriculteurs déclarent avoir modifié leurs pratiques de désherbage et mis en place du désherbage alternatif ; cette part atteint le quart des exploitations en MAEC et près de la moitié des exploitations certifiées bio. Quatre exploitations en MAEC sur dix ont aussi arrêté les traitements phytosanitaires systématiques. Sur l’ensemble de la Bretagne, c’est le cas pour plus du quart des exploitations.
De nombreux exploitants font évoluer leurs pratiques de protection des cultures
L’évolution des pratiques de protection des cultures ces cinq dernières années est massive en Bretagne. Neuf exploitants sur dix déclarent avoir modifié au moins une de leurs pratiques. Les raisons des changements de pratiques les plus souvent évoquées sont les économies d’intrants et la motivation environnementale. Les exploitations bio évoquent aussi le respect de la réglementation. Les aides agro-environnementales sont peu mentionnées, sauf pour les exploitations en MAEC ayant modifié leurs rotations. Près de la moitié des exploitations bio et en MAEC ont modifié les rotations des cultures (allongement, diversification, etc.), un tiers dans la population globale.
Pour quatre agriculteurs bretons sur dix ayant fait évoluer leurs pratiques de protection des cultures, les coopératives sont la principale source d’information sur les techniques à mettre en œuvre. L’accompagnement par les coopératives est néanmoins beaucoup moins mentionné par les agriculteurs en MAEC (23 %) et surtout par les agriculteurs bio (15 %). Pour ces deux groupes d’exploitations, le rôle des chambres d’agriculture est plus important que dans la population globale et pour les exploitations bio il devance même celui des coopératives (28 %).
Dans les années à venir, quatre agriculteurs sur dix souhaitent faire évoluer leur exploitation vers des pratiques plus économes en engrais et en produits phytosanitaires. Mais seul un agriculteur bio sur dix exprime ce souhait. Sans doute une bonne partie des agriculteurs bio, déjà économes en engrais et en produits phytosanitaires, considèrent-ils ne plus avoir de marge de progrès en la matière. Les cahiers des charges de l’agriculture biologique et des MAEC – du moins celui des MAEC SPE – favorisent des conduites plutôt extensives. Pourtant, 11 % des exploitations bio et 14 % des exploitations engagées en MAEC comptent dans les années à venir transformer leur système de production en un système plus extensif. Cette proportion est de 6 % dans la population globale.
Remerciements
Cette publication a fait l’objet d’un comité de rédaction associant des personnes en charge du pilotage de la politique agroenvironnementale, de l’instruction des dossiers et de l’accompagnement des agriculteurs au sein des structures suivantes : la direction régionale de l’alimentation, de l’agriculture et de la forêt de Bretagne, les directions départementales des territoires et de la mer des Côtes-d’Armor et du Finistère, le conseil régional de Bretagne, l’agence de l’eau Loire-Bretagne, le syndicat du bassin versant du Couesnon. Réuni à deux reprises, il a permis d’orienter les travaux, d’apporter une expertise et de valider le contenu de la publication.
Pour en savoir plus
-* Documents de cadrage, arrêtés, notices des mesures, cartes sur les MAEC et les CAB MAB :
Publications du Centre d’études et de prospective du SSP, disponibles sur le site agreste.agriculture.gouv.fr :
Méthodologie, sources et définitions
Bilans quantitatifs, montants payés et montants engagés
Les aides liées à la production agricole constituent le 1er pilier de la PAC. La politique de développement rural est quant à elle pilotée grâce aux aides du 2nd pilier. Les aides du 2nd pilier sont gérées par programme d’une durée de sept ans (2000-2006, 2007-2013, 2014-2020). En 2014, les MAE ont continué à être gérées avec les cahiers des charges et sur budget de 2007-2013. C’est pourquoi, dans la présente étude, par abus de langage, il est question de programmation 2015-2020. Les bilans quantitatifs sont réalisés à partir des extractions disponibles sous le logiciel ISIS, outil de télédéclaration (télépac) et d’instruction des dossiers PAC. Seuls les déclarants bretons sont pris en compte dans ces bilans. Pour les aspects financiers, ils concernent la période 2015-2020. En revanche, la campagne 2020 correspondant à des prolongations de contrat, les autres analyses ont essentiellement été menées sur les campagnes 2015 à 2019, plus représentatives.
Pour la mise en perspective des aides MAEC et CAB MAB au regard de l’ensemble des aides, les aides retenues sont :
les aides directes du 1er pilier : paiement de base, redistributif, vert, jeune agriculteur, aides végétales, aides animales, les aides du 2nd pilier dites "surfaciques" : Mesures agroenvironnementales et climatiques (MAEC), Conversion à l’agriculture biologique (CAB), Maintien de l’agriculture biologique (MAB), Indemnités compensatoires de handicaps naturels (ICHN) et assurance récolte.
Ne sont donc pas prises en compte les autres aides du 2nd pilier comme l’aide à l’installation des jeunes agriculteurs, le Plan de modernisation des bâtiments d’élevage (PMBE), le Plan végétal pour l’environnement (PVE), le Plan de compétitivité et d’adaptation des entreprises agricoles (PCAE).
Les montants payés de l’année N (graphiques 1 et 4) sont ceux payés au titre de la campagne N, quelle que soit la date effective de paiement et, pour les aides du 2nd pilier, quelle que soit la date de souscription du contrat (en année N ou antérieure). Ce sont les montants payés nets, après toutes réductions, y compris au titre de la discipline financière, et après pénalités. Ces montants incluent, pour le 1er pilier, le retour de la discipline financière de la campagne précédente. Pour le 2nd pilier, les paiements au titre des aides de la programmation 2007-2013 ne sont pas pris en compte.
Pour la dynamique de contractualisation (tableau 3 et graphiques 5 à 7 ), le nombre de contrats souscrits, les surfaces et montants de l’année N correspondent aux nouveaux contrats souscrits en année N, aux surfaces nouvellement engagées en année N (et qui en théorie restent sous contrat jusqu’en N+4 pour les contrats de cinq ans), aux besoins financiers sur toute la durée des nouveaux contrats souscrits.
Enfin, dans le texte, les exploitations qui ont un engagement en cours en année N, dont les contrats ont été souscrits en années N ou antérieures, et les surfaces en cours d’engagement en année N, sont désignées par les termes "exploitations engagées" et "surfaces engagées".
Sources
Le Registre parcellaire graphique (RPG) est une base de données géographiques servant de référence à l’instruction des aides de la PAC. Elle contient notamment le contour des parcelles déclarées à la PAC, avec leur code culture, leur surface et l’information si la parcelle est ou non conduite en bio (indépendamment de la perception d’aides CAB ou MAB). Dans cette étude, seules les parcelles des déclarants bretons localisées en Bretagne sont prises en compte. Un déclarant est considéré comme agriculteur bio s’il déclare au moins une parcelle conduite en bio.
Déclarations de flux d’azote (DFA) : en vue de la protection des eaux contre la pollution par les nitrates d’origine agricole, une déclaration annuelle des quantités d’azote épandues ou cédées est obligatoire pour l’ensemble de la Bretagne. Elle couvre la période allant du 1er septembre N-1 au 31 août N. Dans le cadre de sa DFA, un agriculteur doit notamment renseigner le nombre d’animaux présents ou produits sur la période.
Définitions
L’Unité de gros bétail (UGB) est utilisée pour comparer ou agréger des effectifs animaux d’espèces ou de catégories différentes. A chaque type d’animal est attribué un coefficient. Pour l’éligibilité à la MAEC SPE herbivore, par exemple, un bovin de plus de deux ans ou une vache ayant vêlé compte pour 1 UGB, un ovin de plus d’un an ou une brebis ayant déjà mis bas compte pour 0,15 UGB.
La Production brute standard (PBS) , par un jeu de coefficients attribués aux cultures et aux cheptels, donne une valeur au potentiel de production des exploitations. Elle permet de classer les exploitations selon leur spécialisation ou Orientation technico-économique (Otex) . Une exploitation est considérée comme spécialisée dans une production quand cette dernière génère au moins deux tiers de sa production brute standard. Dans cette étude, l’Otex des déclarants PAC en 2019 est approchée grâce aux surfaces graphiques déclarées à la PAC en 2019 et aux effectifs animaux des DFA 2018/2019
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Notes et références
1 . Le cahier des charges des MAEC SPE impose le respect d’une part maximale de surface en maïs (hors maïs grain et semence) dans la surface fourragère. La part de maïs est calculée en tenant compte des achats de maïs, convertis en un équivalent surface. Cette donnée n’étant pas accessible en routine pour l’ensemble des déclarants PAC, la part du maïs fourrage dans la SFP calculée dans le tableau 4 ne tient pas compte des achats de maïs. Par ailleurs, la destination du maïs, fourrage ou grain, prise en compte est celle indiquée dans la déclaration PAC. Or elle peut changer postérieurement à la déclaration PAC, de maïs fourrage à grain ou inversement, en fonction des aléas climatiques.