Agreste Études n°4 2022 - Comptes provisoires de l’agriculture 2021 - La hausse de la valeur de la production l’emporte sur celle des intrants
En 2021, la valeur de la production de la branche agricole s’accroît en Bretagne, sous l’effet de l’augmentation des prix et des volumes des produits végétaux, ainsi que des prix des produits animaux. La valeur des produits végétaux progresse nettement, principalement grâce aux céréales. En dépit de volumes plus élevés qu’en 2020, leurs prix s’envolent du fait du dynamisme de la demande de produits agricoles lié à la reprise économique suite à la pandémie de la Covid-19. Dans ce contexte, les prix du lait de vache, des gros bovins, des veaux de boucherie, des volailles et des œufs de consommation se redressent également. En revanche, le cours du porc recule, en lien avec le repli de la demande chinoise. Parallèlement, le coût des intrants augmente, en raison de prix nettement plus élevés qu’en 2020 en matière d’énergie et d’aliments achetés destinés aux animaux. La valeur ajoutée de la branche agricole bretonne s’améliore cependant, la hausse de la valeur de la production l’emportant sur celle des consommations intermédiaires.
Après deux années de de baisse, en France, la valeur de la production de la branche agricole se redresse nettement en 2021 (+ 7,7 %), après deux années de baisse, sous l’effet de la hausse des prix des produits agricoles. Elle augmente dans toutes les régions, à l’exception de Provence-Alpes-Côte d’Azur, région touchée par le recul de la production fruitière lié au gel printanier. Pour dix régions sur treize, dont la Bretagne, 2021 est l’année de plus forte valeur globale sur la période 2017-2021. La valeur de la production végétale s’accroît de 12 % au niveau national, grâce à la forte hausse des prix, conséquence du dynamisme de la demande de produits agricoles lié à la reprise économique et du recul de certaines productions. Les prix des céréales, oléagineux et fruits atteignent ainsi des niveaux inédits sur les dix dernières années. Sur la période 2017-2021, le niveau de la valeur de la production végétale est au plus haut en 2021 pour dix régions, dont la Bretagne.
S’agissant de la production animale, la valeur augmente faiblement en France (+ 1,7 %), la hausse des prix l’emportant légèrement sur la baisse modérée des volumes. Les prix progressent pour l’ensemble des produits animaux, excepté en porcs. Sur la période 2017-2021, le niveau de la valeur de la production animale est au plus haut en 2021 pour sept régions. C’est la 2e année de plus forte production pour quatre autres régions, dont la Bretagne (après 2019).
Parallèlement à la hausse des prix des produits agricoles, après avoir diminué en 2020, la valeur des consommations intermédiaires augmente en France (+ 3,3 %), sous l’effet prix. La progression, qui concerne la majorité des régions, résulte principalement de l’accroissement des prix de l’énergie et des aliments pour animaux achetés. En dépit de charges plus élevées, la valeur ajoutée brute de la branche agricole de l’Hexagone s’améliore (+ 13,9 %), grâce à l’évolution de la valeur de la production. À l’instar de la production, la valeur ajoutée brute dépasse celle de 2020 dans l’ensemble des régions, excepté Provence-Alpes-Côte d’Azur. La hausse est plus modérée dans les régions d’élevage que dans les régions céréalières. Compte tenu des évolutions des différents postes (production, consommations intermédiaires, subventions, impôts), la Valeur ajoutée brute au coût des facteurs (VABCF), rapportée au nombre d’actifs, s’accroît en France, comme dans l’ensemble des régions, excepté Provence-Alpes-Côte d’Azur.
En Bretagne, la valeur de la production de la branche agricole, hors subventions, s’accroît de 5,7 % en 2021, soit un peu moins qu’au niveau national, pour atteindre 9,30 milliards d’euros. La hausse s’explique surtout par celle des produits végétaux, mais aussi par celle des produits animaux.
Augmentation des prix et des volumes des produits végétaux
En 2021, la valeur des produits végétaux progresse en Bretagne de 14 % par rapport à 2020, portée à la fois par les prix et par les volumes. Comparée à la moyenne quinquennale, la valeur bretonne des produits végétaux progresse de 18,7 % (+ 13,7 % pour l’Hexagone). Globalement, les prix et les volumes excèdent respectivement de 8 % et de 5,5 % ceux de 2020. L’accroissement de la valeur concerne avant tout les céréales (+ 4,2 %), en raison d’une explosion des prix, accompagnée d’une augmentation des volumes, notamment en blé. L’envol des prix est la conséquence d’une demande internationale très soutenue (en particulier de Chine) et de récoltes limitées chez les principaux pays exportateurs de blé et d’orge. Parmi les postes ayant un effet positif sur la VABCF bretonne, celui des céréales explique 44 % de l’accroissement (Cf. tableau 1). En 2021, la valeur produite en légumes recule, en revanche, du fait de prix en baisse sur un an (tomates, choux-fleurs, artichauts, endives…), avec des volumes stables. Celle en pommes de terre s’améliore légèrement, grâce à des prix plus élevés, malgré des volumes plus faibles.
Hausse des prix des produits animaux, sauf en porcs
En 2021, la valeur de la production animale gagne 3 % sur celle de 2020 en Bretagne, grâce à une hausse générale des prix, excepté en porcs, avec des volumes globalement stables. C’est un peu plus qu’au niveau national. Comparée à la moyenne quinquennale, la valeur de la production animale progresse de 4,6 % pour la région (+ 4,2 % pour l’Hexagone).
L’accroissement annuel de la valeur animale concerne en premier lieu la production laitière. Après avoir légèrement reculé en 2020, la valeur de la production laitière s’améliore de 3,9 % en 2021, sous l’effet prix. C’est le deuxième facteur explicatif de l’augmentation de la VABCF, après les céréales, à hauteur de 11 %. Le marché du lait conventionnel profite de la hausse des cours, soutenus par la consommation mondiale de produits laitiers. À l’inverse, le prix du lait bio, 5 % de la collecte bretonne en 2021, diminue légèrement, dans un contexte de déséquilibre entre l’offre croissante et le ralentissement de la consommation.
Concernant les bovins, la valeur produite en gros bovins augmente de 6,3 % en un an, malgré un repli des volumes. Les disponibilités réduites en bovins (manque de jeunes bovins en France et pénurie de femelles partout en Europe) font grimper les cotations dans un contexte de demande soutenue. Dans le bassin Grand Ouest, la hausse annuelle des prix atteint 13 % pour les vaches laitières P et 6,3 % pour les jeunes bovins à viande U.
Concernant les veaux de boucherie, la valeur grimpe de 11,4 % en un an, totalement grâce aux prix. Dans un contexte d’offre limitée après deux années de crise, la reprise à partir de juin 2021 de la restauration hors domicile (RHD), principal débouché de la viande de veau, permet la revalorisation des cours.
En aviculture, la valeur de la production d’œufs de consommation s’accroît de 8,5 %, du fait d’une hausse simultanée des volumes et des prix. Le marché des œufs, touché par la pandémie de la Covid-19 depuis 2020, est porté au second semestre par la demande européenne et la réouverture de la RHD. Les volumes progressent grâce au dynamisme de la production d’œufs en mode alternatif (biologique, plein air ou au sol), tandis que celle des œufs cage se réduit.
S’agissant des volailles, la valeur produite gagne 5,4 % sur celle de 2020, grâce aux prix, en dépit de volumes réduits. Les abattages faiblissent en poulets et chutent en dindes, tandis que l’augmentation du coût de l’aliment est répercutée sur les prix des marchés de cette filière intégrée.
Parmi les productions animales, la production porcine est la seule dont la valeur diminue en 2021 (– 2,7 %). Les volumes progressent légèrement, mais les prix reculent de 4,1 %. Le marché du porc subit la forte influence de la demande chinoise, soutenue au premier semestre, puis restreinte au second, le pays reconstituant son cheptel, décimé par la peste porcine africaine apparue en 2018. Par ailleurs, la levée des restrictions des exportations allemandes vers l’Asie, hors Chine, permet de fluidifier le marché européen au premier semestre. En augmentation jusqu’en mai, les prix des porcins baissent, ainsi, au second semestre, suite au ralentissement de la demande chinoise et à la saturation du marché européen. Ce poste participe de 11 % à la dégradation de la VABCF (Cf. tableau 1).
Énergie et alimentation animale pèsent sur les intrants
Après s’être stabilisée en 2020, la facture relative aux consommations intermédiaires augmente en 2021 (+ 4,5 %), sous l’effet de l’accroissement des prix de l’énergie et de l’alimentation animale. Celui des aliments achetés pour animaux (+ 11,5 %) suit la forte hausse du prix des céréales, avec des volumes un peu inférieurs à ceux de 2020. Compte tenu de l’importance de la valeur des aliments achetés pour animaux dans les consommations intermédiaires en Bretagne (43 %, contre 20 % en France), ce poste contribue à 60 % de la dégradation de la VABCF (Cf. tableau 1). Le poste énergie, quant à lui, y participe à hauteur de 11 %. Le prix de l’énergie explose, en effet (+ 24 %), dans un contexte de demande internationale très soutenue liée à la reprise de l’activité. A contrario, la moindre consommation d’engrais et d’amendements permet d’alléger la facture. Par ailleurs, les prix et les volumes des produits phytosanitaires sont comparables à ceux de 2020.
Stabilité des aides versées aux agriculteurs
En 2021, selon les premières estimations, le montant total des aides directes versées aux agriculteurs se maintiendrait en Bretagne, à 467 M€ (+ 3 % au niveau national). En 2020, ces aides diminuaient, en raison principalement de la transformation du CICE (Crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi) en un allègement de cotisations patronales. Comparé à la moyenne quinquennale, le montant 2021 des aides directes serait toutefois en repli de 9,2 % pour la région et de 3,3 % en France.
Le montant des aides couplées, représentant 8,6 % du total des subventions bretonnes, diminuerait légèrement, comme à l’échelon national. Il s’agit principalement d’aides aux bovins laitiers et aux bovins allaitants (respectivement 21 M€ et 16 M€ en Bretagne).
Les aides découplées dues au titre de l’exercice 2021 gagneraient 0,6 % en un an, à 427 M€ (+ 3,6 % en France). Ces subventions d’exploitation sont composées principalement des paiements découplés du premier pilier, stabilisés en 2021 à 378 M€. Ils comprennent pour 49 % le paiement de base, pour 34 % le paiement vert, conditionné au respect de pratiques favorables à l’environnement, pour 15 % le paiement redistributif (aide aux 52 premiers ha) et pour 2 % le paiement jeunes agriculteurs. L’évolution apparaît légèrement positive pour la première catégorie, et faiblement négative pour les trois autres.
Entre deux programmations des aides de la PAC (2015-2019 et 2023-2027), l’année 2021, comme l’année 2020, constitue une année de transition.
La valeur ajoutée brute s’améliore
Après avoir diminué de 8 % en 2020, la Valeur ajoutée brute (VAB) , qui découle des évolutions précédentes, s’accroît de 8,3 % en 2021 en Bretagne, l’augmentation de la valeur de la production l’emportant sur celle des consommations intermédiaires.
En tenant compte des subventions d’exploitation, en hausse négligeable, et des impôts, en légère baisse, la valeur ajoutée brute au coût des facteurs progresse de 7,5 % en Bretagne (+ 12 % en France).
Rapportée au nombre d’actifs (unités de travail annuel totales), en recul, la VABCF gagne 8,8 %, hors inflation, sur celle de 2020, en Bretagne. Au niveau national, elle s’accroît de 13,3 %
Chiffres-clés
La valeur de la production animale
65 % de la valeur totale de la production agricole régionale ;
22 % de la valeur de la production animale française ;
1er rang des régions françaises pour cette valeur.
La valeur de la production végétale
27 % de la valeur totale de la production agricole régionale ;
5 % de la valeur de la production végétale française ;
11e rang des régions françaises pour cette valeur.
Méthodologie
Les comptes macro-économiques de l’agriculture sont une opération de comptabilité nationale, menée conjointement au niveau national par l’Insee et par le SSP (Service de la statistique et de la prospective) du ministère de l’Agriculture et de la Souveraineté alimentaire, avec l’aide des Services régionaux de l’information statistique et économique (Srise) au niveau régional. Ces comptes suivent des règles définies au niveau européen et sont obligatoirement transmis chaque année à Eurostat. Ils portent sur le champ de la branche agricole, qui comprend l’ensemble des exploitations agricoles, ainsi que les entreprises de travaux agricoles, les Coopératives d’utilisation du matériel en commun (Cuma), les coopératives viticoles et les centres d’insémination artificielle.
Les comptes régionaux macro-économiques sont établis en trois versions : provisoire, semi-définitive et définitive. La diffusion est faite une fois par an, en juillet, à l’issue de la CCAN (Commission des comptes de l’agriculture de la Nation) : comptes provisoires N-1, semi-définitifs N-2 et définitifs N-3.
L’indicateur de revenu régional privilégié, retenu par le SSP depuis la CCAN de juillet 2016, est le Résultat courant avant impôt (RCAI) par actif non salarié (Utans), issu du Rica, (Réseau d’information comptable agricole) calculé par orientation technico-économique de l’exploitation (Otex) et par région.